Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
26 août 2010 4 26 /08 /août /2010 23:00

h-3-2189504-1282260534-copie-1.jpgLes journées d'été sont un moment que j'aime bien: on y fait de la politique de manière décontractée, on revoit les connaissances, on découvre de nouvelles personnes militants de fraiche ou de longue date, voire pas militants du tout, mais curieux de tout.

 

Cette année, ces journées étaient une étape importante pour la construction d'un nouveau mouvement politique écologique.

Pas facile de construire un nouvel outil avec des gens venant d'horizons différents, portant des projets différents mais aspirant à répondre ensemble aux souhaits des français qui vivent de plus en plus gravement et durement la conjonction de crises écologiques, économiques, sociales et démocratiques (voir mes trois précédents billets). Il est évident que le côté bling-bling de nos dirigeants ne fait plus recette.

Ces journées étaient aussi des journées de formation, d'éducation populaire où chacun pouvait trouver chaussure à son pied (je suis allé par exemple à un atelier sur la ville durable, sur la conversion écologique de l'économie, sur le logement social).

2 000 participants -du jamais vu - ont eu du mal en 3 jours à choisir entre tous les ateliers proposés, tellement l'offre était riche et diverse

 

Pour ma part, j'ai retenu deux temps forts qui m'ont particulièrement marqué, et moins les médias plus attentifs aux petites phrases. Je les ai en tout cas trouvé très stimulant intellectuellement et politiquement.

 

Un débat sur le lien entre crise sociale et crise morale, avec une interrogation sur l'état de la société française, entre détresse et lassitude.

Invité à ce débat, le Médiateur de la République, ancien ministre chiraquien, président pendant 10 ans de l'Association des Maires de France, qui a découvert dans ses nouvelles fonctions la fracture sociale. Fin 2009, il a  publié son rapport annuel en décrivant la société française comme « psychiquement fatiguée ». A l'appui du diagnostic, un état des lieux accablant des détresses ordinaires et collectives. Effets de « la crise » - et quelle crise ? - ou abattement durable? Ce débat, animé par Mickaël Marie, membre de la direction nationale des Verts, auquel participaient outre Jean-Paul Delevoye, médiateur de la République, François Miquet-Marty, directeur de l'institut Viavoice,  Daniel Cohn-Bendit, Eva Joly et Cécile Duflot,.était d'une grande tenue

A partir des constats du Médiateur qui  brosse dans son rapport annuel un tableau très sombre de la société française, évoquant un sentiment d'injustice, un ressentiment des citoyens à l'égard de l'administration et une banalisation de la violence, qui " sent une société en tension et en usure psychique", le débat s’engage.   "Avant, on était crevé au boulot, maintenant on est usé dans sa vie, on est tendu tout le temps". La mésestime de soi s'est substitué à l'estime de soi. La société est de plus en plus duale, avec deux sociétés en concurrence et en violence, se retrouvant non plus dans les aspirations collectives, mais dans les destins individuels. On vit de plus en plus au détriment des autres du fait "de l'explosion de mythes républicains, comme la gratuité ou la mixité sociale".

"La qualité des rapports humains se dégrade avec des montées d'agressivité au sein des familles, des entreprises, des espaces publics", a-t-il ajouté, déplorant une "banalisation de la violence" et une judiciarisation excessive des conflits, preuves selon lui d'un manque de dialogue, faisant apparaître un "racisme social".

La disparition des lignes de partage idéologiques (la fracture sociale en 1995 avec Chirac, la sécurité en 2002 avec Jospin) accentue le délitement social.

 

Le rapport fait apparaître clairement qu’environ 15 millions de français sont tellement fragilisés qu’ils considèrent que leur budget se joue entre 50€ et 150€, et que cette variation de leurs revenus peut les mettre en danger. L'augmentation du suicide chez les adolescents (plus aux Etats-Unis qu'en Europe) est une alerte forte pour nos sociétés.

 

La question de l’utilité sociale est posée et il est évident que le clivage entre actifs et inactifs est dépassé. Après un tel constat, définir un projet politique n'est pas simple. Comment déconstruire la méfiance? Quelle est la capacité d'une force politique qui veut transformer la société?  Le  rythme, la dynamique des changements doit tenir compte de l'état des lieux.

 

Le second débat, devant une salle d’environ un millier de militants attentifs concernait la démocratie et les56231538.jpg conditions de la sortie de sa crise.

Les trois premières années de mandat de Nicolas Sarkozy sont marquées par d'importants reculs pour les libertés et l'indépendance de la justice. Suppression programmée du juge d'instruction et pressions sur la justice d'un côté, réforme de France télévisions, dérapages envers les journalistes et remises en cause constantes de leur indépendance de l'autre... Le démocratie et l'idéal républicain sont meurtris par cette présidence maintenant engluée dans la récente affaire Woerth-Bettencourt dont les ramifications ne doivent pas faire oublier le karachigate.

Pour sortir de cette véritable crise démocratique les écologistes, la société civile et les médias indépendants se doivent de proposer un projet alternatif. Un projet qui ne soit pas simplement un retour à la « normalité » des années précédentes mais une série d'avancées pour garantir l'indépendance de la justice et de la presse nécessaires au bon fonctionnement d'une démocratie et d'un État de droit.

 

Participaient à ce débat Marie-Pierre de La Gontrie, secrétaire nationale aux libertés publiques et à la justice au PS, Edwy Plenel, fondateur de Mediapart , Eva Joly, députée européenne, Lucile Schmid, de Europe écologie, Bastien François, conseiller régional Europe Ecologie d'Ile-de-France, cofondateur de la Convention pour la 6ème République.

Le premier intervenant était Edwy Plenel, immédiatement et longuement acclamé par l’ensemble des participants, tout le monde ému, lui sur la tribune, les centaines de présents dans l’amphithéâtre.

 

 Edwy Plenel a décliné les enjeux qui l’ont amené à ses engagements journalistiques et citoyens.

- Aujourd’hui, il s’agit de faire des propositions et non plus des diagnostics.

- La pratique du pouvoir et la pratique démocratique a franchi toutes les limites.

- La montée des abstentions va de pair avec l’inquiétude des citoyens qui constatent que les projets politiques sont déconnectés de la réalité de leur quotidien.

- C‘est la société civile qui montre le mieux le chemin et donc la publicité faite à la chose politique est une sauvegarde pour les citoyens.

« Nicolas Sarkozy est un enseignement à lui seul car il nous révèle à nous-mêmes. En effet, le pouvoir qu’il exerce sans partage est fort de nos faiblesses : viol de la constitution, justice d’un autre temps, la police qui conquiert les préfectures… : l’immense scandale de cette politique faite pour une minorité, l’absence de toute vertu civique, pourquoi donc cela ne soulève t-il pas une protestation beaucoup plus massive et puissante ? Pourquoi n’y a-t-il pas de prise de position de nos intellectuels ?

Mais d’où vient Sarkozy ? Nous sommes obligés de constater que notre pays manque, et depuis des décennies, de culture démocratique. Mais aujourd’hui la dérive est devenue immense. Et le pouvoir d’intervention permanente sur les médias et les nominations présidentielles y sont forcément pour quelque chose. Il y a d’un côté le peuple que l’on divise, qu’on réprime, qu’on monte contre lui-même, et de l’autre côté les élites où tout s’arrange discrètement et pour le mieux.

Sous une apparence démocratique, il y a l’exercice d’un contrôle permanent sur les citoyens, un traitement répressif des plus précaires, cependant que les oligarchies étatiques s’affairent avec les oligarchies économiques. La corruption est familière à  ces gens du même monde.

Des trois grands principes de notre république, c’est l’Egalité qu’ils n’aiment pas ! Ils ont la haine de l’Egalité comme conviction et comme une cohérence dans leurs entreprises. Il y a une volonté absolue de recréer des hiérarchies et la haine de la presse, de la justice, de leur indépendance. Or, un bon citoyen est un citoyen informé. Victor Hugo disait : «  Le principe de la liberté de la presse n’est pas moins sacré que le principe du suffrage universel. Attenter à l’une, c’est attenter à l’autre ! »

Alors, il s’agit de se défaire de ce présidentialisme absolu et s’engager pour cela dans une campagne, elle-même présidentielle. Et ensuite changer les règles très vite, en 6 mois, c’est possible, avant que le rouleau compresseur des institutions ne nous contamine.

La démocratie n’est pas un catalogue de mesures, c’est l’établissement d’une culture, une culture démocratique accessible à tous. Refusons cette république confisquée par le règne des intérêts personnels et élevons ce pays en élevant son langage. La démocratie se mérite et ce n’est pas un confort. A nous, citoyens, face aux intérêts partisans, de faire revivre un idéal ! »

 

Les applaudissements nourris qui ont suivi son interventions montraient que son analyse était mieux que partagée.

Le reste des interventions étaient plus convenu

 

Partager cet article
Repost0

commentaires