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7 septembre 2009 1 07 /09 /septembre /2009 00:14

 

Voici la position, exprimée le 26 août 2009, de la Fédération des associations de protection de la Nature et de l’Environnement sur la Contribution Climat Energie/Taxe carbone :


« Le gouvernement recule en donnant l’impression d’avancer

La Ministre des Finances Christine Lagarde a déclaré ce matin que le montant de 15 euros par tonne de CO2 lui semblait un bon taux pour la future Contribution Climat Energie (CCE), qui devrait être mise en place dès janvier 2010. Pour FNE, les récentes déclarations ministérielles laissent craindre que le Gouvernement ne s’écarte de l’objectif initial de la CCE

Evitons les faux débats

Pour Sébastien Genest président de FNE, le Gouvernement commet une grave erreur s’il espère avancer sur le sujet en se focalisant sur le chiffre de 15 euros. « une taxe carbone à 15 euros mais sans redistribution de son produit pèsera bien plus sur le pouvoir d’achat qu’une taxe à 32 euros mais avec redistribution. N’enterrons pas la Contribution climat énergie au profit d’une taxe carbone avec un simple vernis vert »

Arnaud Gossement, porte parole de FNE ajoute : « De plus ce taux de 32 euros correspond au taux d’une taxe carbone qui ne porterait pas sur l’électricité, ce qui est également une erreur. Il faut donc un taux qui garantisse le signal prix pour le consommateur, une assiette qui garantisse la baisse de la consommation d’énergie et un mécanisme de redistribution socialement incontestable. Il faut également que le Gouvernement précise sa position sur l’augmentation progressive dans le temps du taux de la taxe. C’est sur ces sujets que nous attendons le Gouvernement. »

FNE s’oppose à la création d’une taxe carbone qui ne serait pas, à la fois, un facteur de progrès et social et environnemental.

Le risque d’une CCE au rabais

Après les déclarations hier d’Eric Woerth et de Chantal Jouanno, qui affirmaient que 32 euros par tonne de CO2 étaient un montant trop élevé et lui préférait un taux compris entre 14 et 20 euros par tonne de CO2, Christine Lagarde confirme la tendance à la baisse des ambitions en se prononçant pour un taux de 15 euros.

Ces déclarations font craindre à FNE qu’on ne se dirige vers une CCE au rabais, bien en deçà du montant de 32 euros conseillé par le rapport de Michel Rocard à l’issue de la conférence d’experts. Ce taux est pourtant le minimum nécessaire pour atteindre l’objectif d’une division par 4 des émissions de gaz à effets de serre en 2050, qui est théoriquement celui de la France [1]. Or il est crucial que l’instrument soit suffisamment efficace pour conserver toute sa pertinence environnementale.


Ne pas oublier la redistribution…

Le Gouvernement ne parle plus que de taux, et à peine de redistribution. C’est pourtant là un point central si on veut une CCE qui soit socialement équitable et n’accable pas les plus défavorisés.

Plutôt que de tenter de faire passer la pilule en baissant le taux d’imposition, ce qui aura comme effet principal de diminuer l’efficacité environnementale de la CCE, le gouvernement ferait mieux de se concentrer sur la mise au point d’un mode de redistribution qui permette le soutien aux plus faibles et l’aide à la transition vers une économie sobre en carbone ! C’est comme cela qu’on fera de la CCE un facteur de progrès social, pas en la vidant de sa substance.

… ni l’électricité

Cette concentration sur les « 32 euros » (en passe de devenir 15) révèle aussi l’oubli de l’énergie électrique : les 32 euros ne visent que le poids carbone de l’énergie. Or FNE n’a cessé de répéter que la CCE doit également porter sur l’énergie électrique, sans quoi on risque d’observer un report des énergies fossiles vers l’électricité. Cet oubli est donc inquiétant, car la production d’électricité entraîne elle aussi des émissions de CO2, et car le but de la CCE doit aussi être d’aller vers une plus grande efficacité et sobriété énergétique.


________________________________________
[1] D’après les travaux de la commission Quinet, le taux idéal pour parvenir à la division par 4 des émissions de gaz à effets de serre françaises devrait être de 45 euros la tonne, mais pour éviter tout choc économique, le Commission a proposé la valeur de 32 euros, qui est donc lui-même inférieur à l’idéal environnemental.
 »

 

Le 28 juillet 2009 la FNE avait développé son soutien à la contribution climat énergie :

« Contribution Climat Energie : un facteur de justice sociale et environnementale.

A la suite de la conférence d’experts sur la Contribution Climat Energie, Michel Rocard, son président, rend son rapport cet après-midi. Réaction de FNE

« Pour contribuer à la réussite des négociations internationales sur le climat, la France doit être exemplaire. Pour cela, elle doit utiliser tous les leviers. La contribution climat énergie peut être un outil d’une justice à la fois sociale et environnementale. Le pire serait de ne rien faire. Dans ce cas, les plus pauvres seront les premières victimes de la crise écologique et économique. » déclare Sébastien Genest, président de France Nature Environnement.

Pourquoi une contribution climat énergie ?

Changer progressivement les équilibres économiques : tel est l’objectif d’une Contribution Climat Energie. Sa vocation première est de répondre à deux crises majeures, l’une environnementale, en l’occurrence les émissions diffuses de gaz à effet de serre, l’autre socio-économique, la crise de l’énergie. Par la mise en place d’un « signal-prix », la CCE permet d’orienter le comportement des agents économiques en les incitant à consommer des produits et services moins émetteurs et plus sobres en énergie. Notre société doit se désintoxiquer des produits carbonés et énergivores. La redistribution des recettes de la CCE permettra aux produits vertueux de gagner en compétitivité et de protéger les plus faibles.
Pour FNE, la CCE est un outil structurant essentiel pour amorcer la conversion écologique de l’économie.


Comment la mettre en place ?

Dans l’idéal, il faudrait établir une contribution sur la base du « poids carbone » et du « poids énergie » de chaque produit. Si cette solution est trop complexe à court terme, il serait plus réaliste d’envisager l’application de la CCE aux seules consommations énergétiques, notamment celles responsables d’émissions directes de GES. Sont donc concernées les consommations énergétiques des entreprises, des ménages et des administrations. Rappelons que les consommations énergétiques représentaient, en 2007 en France, 72,4% des émissions totales de gaz à effet de serre et 94,7% des émissions de CO2.
Les 27,6% restant, non liés aux consommations énergétiques, devraient faire l’objet d’une réflexion complémentaire afin que soient crées des incitations à leurs réductions. FNE souligne l’importance de ne pas oublier les autres GES, en particulier le méthane (CH4) et le protoxyde d’azote (N2O).

La CCE est-elle nécessaire ? Est-elle efficace ? Est-elle suffisante ?

La CCE est nécessaire, mais pas suffisante.

• Elle est nécessaire : elle permet de compléter le système des quotas d’émissions négociables mis en place à l’échelle européenne. Celui-ci ne concerne en effet que les industries les plus polluantes, responsables de 40% des émissions européennes de GES. La CCE permet d’inciter à la réduction des émissions non régulées par quotas, en particulier les émissions diffuses. Et si la mise aux enchères des quotas ne conduit pas à un niveau suffisant du prix de la tonne de carbone émis, la CCE pourra fonctionner pour les secteurs concernés comme mécanisme financier d’ajustement d’une politique énergétique cohérente.

• Elle est efficace : Pratiquement personne ne conteste plus la réalité de « l’élasticité au prix » de la consommation d’énergie. De nombreux travaux économiques ont montré que le niveau des prix de l’énergie a un impact direct sur la consommation énergétique. Mais Au niveau actuel des marchés de l’énergie, la sensibilité au prix est nettement plus marquée qu’avant la dernière crise pétrolière, et rend pleinement efficace une politique de « signal prix » envoyé à tous les agents économiques avec la CCE.

Ce constat, et la compréhension de l’urgence climatique, expliquent que tous les acteurs qui se sont exprimés lors de la conférence des experts, syndicats et industriels compris, soient favorables à la CCE.
 
• Elle n’est pas suffisante : la CCE ne saurait, à elle seule, régler tous les problèmes d’émissions de gaz à effet de serre. Il faut continuer à agir par d’autres voies en parallèle : les systèmes de quotas européens et internationaux doivent être améliorés, notamment par l’introduction de quotas payants, et la règlementation doit être renforcée partout où subsistent des « passoires » énergétiques et climatiques.
En outre, pour être juste et efficace, la CCE doit être une décision parmi les 273 décisions du Grenelle, et surtout pas une décision isolée. Elle doit être accompagnée du développement d’offres alternatives au consommateur (développement des transports en commun, politiques de logement social à proximité des transports publics, des emplois et des services, systèmes d’efficacité énergétique…) et d’actions d’éducation à la consommation environnementalement responsable.

La CCE doit-elle porter également sur l’électricité ?

Oui. Un simple report des consommations vers l’énergie électrique, même renouvelable, sans souci de l’objectif de réduction et d’efficacité, passerait à côté d’une dimension majeure du problème. Incidemment, il s’agit aussi de ralentir la prolifération d’installations nucléaires dont l’exploitation émet aussi du CO2, qui ne sont ni propres, ni sans danger, et qui restent totalement inféodées à une ressource qui n’est ni inépuisable, ni exempte d’aléas politiques profonds.

La transition vers une société et une économie durables ne peut se faire qu’en promouvant la sobriété et l’efficacité énergétique.

FNE se positionne donc clairement en faveur d’une assiette double : il faut y inclure les émissions de gaz à effet de serre d’origine énergétique et la consommation d’énergie elle-même
. Cette méthode, adoptée par de nombreux pays, est la seule qui permettra d’atténuer et la crise énergétique, et la crise climatique.

La CCE va-t-elle peser sur le pouvoir d’achat et la compétitivité des entreprises ?

A ces deux questions, la réponse est claire : non. Cela a été montré lors de la conférence des experts. Mais à une condition : une utilisation intelligente et équitable des recettes. La CCE permet d’anticiper la hausse du prix de l’énergie qui est une tendance lourde, au-delà des aléas de la conjoncture, comme on peut l’observer pour l’ensemble des matières premières. Il s’agit d’y préparer l’ensemble de la société : pour les plus modestes, le pire serait de ne rien faire.

L’économie française gagnera en compétitivité en même temps qu’en efficacité (efficacité énergétique, recherche et innovation accrues, réduction des importations de produits fossiles donc du déficit commercial…) Les simulations macro-économiques, dont celles de Bercy, montrent que la CCE peut être source de dynamisme économique. Il conviendra de développer des politiques publiques qui soutiennent la recherche, qui permettent la conversion ou la restructuration de certains secteurs économiques, qui accompagneront les transitions sociales nécessaires.

La CCE doit également s’accompagner d’une politique de l’offre (infrastructures publiques, politiques d’urbanisme et de logement, transports en commun, isolation…) qui permette aux ménages de réduire durablement leurs consommations énergétiques, et donc la facture qui en résulte. Il faut donc garantir l’accès de tous (ménages ou entreprises) à la plus grande efficacité énergétique possible.

FNE a toujours affirmé la nécessité d’agir sur deux fronts : renchérir tous les produits et services dommageables pour l’environnement tout en aidant les acteurs à ne plus en avoir besoin, et en proposant des réponses de substitution.

Quelle serait la meilleure utilisation des recettes ?

Deux questions fondamentales doivent trouver ici leur réponse :

- faire de la CCE un outil réellement efficace
- asseoir la légitimité sociale de cet outil

La CCE n’est pas une mesure inflationniste pénalisante, puisque les recettes en sont immédiatement redistribuées ; c’est une mesure de modification relative des prix des produits et services sur la base d’un critère environnemental.

D’après Michel Rocard, les recettes devraient dans un premier temps s’élever à 8,3 milliards d’euros ; si la CCE fonctionne, elles devraient théoriquement diminuer dans le temps. Les avis sur leur utilisation sont partagés. la plus grande partie du débat tourne autour d’une redistribution, directe ou indirecte, qui permettrait de ne pas alourdir les charges des entreprises, ni celles des ménages.

Le dispositif de CCE n’est acceptable qu’à condition de représenter un progrès social : si ce n’est pas le cas, FNE s’y opposera, car l’objectif premier doit rester celui de la construction d’une société plus durable tant sur les plans environnemental et économique que sur le plan social. Il doit donc prévoir un soutien fort aux ménages qui seraient affectés de manière négative (parce qu’ils sont « captifs » de leur voiture, de leur mode de chauffage…), par exemple un chèque vert, qui devra toutefois être construit de façon à ne pas annuler l’effet du signal prix.

Pour FNE, il n’est pas pensable qu’une partie substantielle des recettes issues de la contribution ne serve pas directement et fortement à porter remède aux causes des crises qu’il s’agit de combattre, c’est-à-dire à diminuer la consommation d’énergie.

Il s’agit donc d’amplifier les efforts en matière de recherche, de formation et d’investissement pour accroître l’efficacité énergétique, notamment en ce qu’elle concerne les populations les plus exposées.

Il s’agit aussi d’impulser de façon considérable les mesures d’adaptation en matière de développement d’énergies de substitution, de réaménagement des villes et des territoires et de reconversion des modes et circuits de transport.

Il reviendra au gouvernement et aux partenaires sociaux et environnementaux de discuter pour trouver un dispositif mixte (investissements, redistribution…) acceptable par tous. La seule condition est, évidemment, que le dispositif dans son ensemble ne revienne pas sur le principe du « signal prix » associé à tous les dommages à l’environnement. 
»

 

 

 

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