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13 janvier 2013 7 13 /01 /janvier /2013 19:22

Quelques éléments de compréhension générale, issus du "Dessous des cartes" de JC Victor

 

Le Sahel, un terreau propice

Situé entre l'océan atlantique et le Tchad, entre le Sahara et les fleuves Niger et Sénégal, le Sahel est depuis quelques années qualifiée de zone de "non-droit, et placé sur l'agenda international au gré de la hausse de la contrebande, des trafics de drogue, d'armes et de migrants, de la résurgence des rebellions armées touarègues au Mali et au Niger, des enlèvement d'occidentaux en Mauritanie et au Mali.

Généralement revendiquées par des groupes islamistes, les attentats ont souvent été attribués à AQMI, la branche maghrébine d'Al Qaida. Cette dernière s'est formée en 2007, lorsque le groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) basé en Algérie, a décidé d'internationaliser ses activités djihadistes et se fondre dans la nébuleuse terroriste.

L'insécurité qui règne au Sahel ne saurait être le fait de cette seule organisation.

D'abord, selon les estimations les plus fiables, AQMI ne compterait vraisemblablement  que 500 individus et la moitié d'entre eux seraient réunis autour de leur chef, Abdelmalek Droukdal, localisé dans le nord-est de l'Algérie.

Ensuite la région est en proie à des rivalités ethniques tenaces, à des différents étatiques parfois latents, à des rebellions internes plus ou moins larvées, à de la criminalité transnationale particulièrement bien organisée.

Souvent il existe d'ailleurs, une imbrication opérationnelle ou financière entre rebelles, mafieux et terroristes. Les activistes défient la puissance publique dans ses prérogatives.

De plus la région  est le lieu d'une lutte d'influence entre pays du Maghreb qui voient le Sahel comme une zone "molle". parmi eux, l'Algérie et la Libye considèrent la région comme leur hinterland naturel et rivalisent pour s'assurer l'exploitation des ressources en sous-sol.

Les Etats sahéliens en première ligne

La Mauritanie, le Mali, le Niger, le Sénégal, le nord  du Nigéria et dans une certaine mesure le Burkina Faso sont les pays les plus directement concernés par ces menaces. A l'exception du Nigéria, , riche Etat pétrolier mais fortement clivé, ces nations appartiennent  àl a catégorie  des "Pays les moins Avancés (PMA)" qui, selon une définition des nations-Unies, n'ont pas les moyens de fournir les services de base  à leur population, comme l'accès à la santé, à l'éducation et à la sécurité. Avec des superficies proches de 1 million de m² (trois fois la superficie de l'Allemagne), dont la moitié nord est formée par le désert, ces Etats ne peuvent contrôler et administrer efficacement l'ensemble du territoire , créant ainsi des zones dans lesquelles trafiquants, rebelles et terroristes peuvent opérer.

Délaissés par leur gouvernement, les habitants ont peu de raison de coopérer avec l'Etat central et n'hésitent pas à tirer profit  des opportunités  qui se présentent, fussent-elles criminelles.

Ces menaces ont suscité diverses réactions parmi les acteurs tiers, comme les pays membres de l'Union européenne et les Etats-Unis. Les pays sahéliens ont en effet sollicité l'aide de leurs partenaires occidentaux, et tout particulièrement celle de la France, ancienne puissance coloniale de la région et avec laquelle certains de ces Etats ont signé des accords bilatéraux de défense. Une approche euro-sahélienne  a été développé par la France, associant l'Espagne et l'Allemagne, mais elle ne saurait être confondue avec une approche coordonnée de l'union européenne.

Dans cette région formant la périphérie immédiate de l'Europe, les activités illégales qui s'y développent (trafics, terrorisme, migrations) ont pourtant un impact direct  sur la sécurité de l'union européenne et sur ses Etats membres. de même les Etats-Unis ont mis sut pied le Trans-Sahara Counter Terrorism Partnership (TSCTP)avec les Etats de la région.. Cependant des Etats comme l'Algérie  et la Libye  n'hésitent pas à faire savoir qu'ils considèrent les partenaires occidentaux  comme illégitimes.

Face çà ces tensions entre Etats, il est donc difficile de coordonner les réponses à cette insécurité régionale, d'autant que l'ordre des priorités n'est pas le même selon que l'on se trouve  à Bruxelles ou à Bamako.

Si les occidentaux  se focalisent sur la menace terroriste, la priorité locale se focalise  avant tout sur l'économie, d'autant plus que les attentats ont fait perdre les recettes issues du tourisme et porté un coup au développement économique et humain de la région.

En surestimant le rôle d'AQMI dans la région, les Nations-Unies, la Banque mondiale et l'Agence Française de Développement offrent à l'organisation une surface médiatique  qu'elle n'aurait jamais pu occuper par ailleurs. Les menaces que fait peser l'organisation terroriste ne semblent pas suffisamment graves pour susciter la constitution d'un front uni des Etats pour la contrer. Il ne s'agit ni de conflits inter-étatiques, ni de guerres civiles, et ces Etats ces Etats ne dont pas des failed states. ils font face à des insurrections  à caractère politico-mafieux, et les menaces à la  stabilité des pays sont parfois  internes, comme les tentatives de coup d'Etat en Mauritanie et au Mali, ou de coup de force constitutionnel au Niger. En 2012, Al Qaida et sa "filiale" maghrébine AQMI traversent toutefois une profonde crise de légitimité et sont rejetées de toutes part pour s'être attaquées essentiellement à des musulmans et avoir provoqué des massacres de civils.

 

Jean-Christophe Victor, le dessous des cartes, itinéraires géopolitiques Arte Editions/Ed Tallandier, septembre 2012.

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