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3 mai 2019 5 03 /05 /mai /2019 08:30

La ville de Colombes est en train d’agrandir la médiathèque Jacques Prévert qui passera prochainement de 1400 m² environ à 1700 m². A cette occasion, une consultation est en cours pour vérifier si les usagers sont plutôt favorables à l’ouverture du dimanche et/ou d’un soir en semaine de cette médiathèque. En vérité cela est la concrétisation d’un mouvement engagé dès 2014 par le collectif "ouvrons plus les bibliothèques". Depuis, plusieurs villes se sont  engagées dans cette voie

Emmanuel Macron, comme cela est devenu une habitude, a donc recyclé un projet engagé avant son arrivée à l’Élysée en lançant  un appel aux collectivités locales faisant suite au rapport Orsenna de février 2018 afin d'ouvrir les médiathèques tard le soir et le dimanche . Le gouvernement a pour cela augmenté de 8 millions d’euros de la dotation générale de décentralisation en faveur des bibliothèques pour les cinq années à venir. De même du côté des moyens, l’ancienne ministre de la culture, Françoise Nyssen prévoyait alors  la mise sur pied d'un programme de 400 services civiques dédiés, qui seraient à disposition pour intervenir dans les bibliothèques.

Le ministère entendait  accompagner les extensions horaires, notamment le week-end, dans certains territoires jugés prioritaires : villes moyennes, quartiers de la politique de la ville, grandes villes au-delà de 100.000 habitants. Avec des objectifs de progression, qui sans être des règles, peuvent servir de caps : ainsi dans les villes de plus de 20.000 habitants, comme Colombes, un accroissement horaire de 20% hebdomadaire d'ici 2022 était préconisé.

C'est dans ce contexte que la municipalité a proposé au conseil municipal en mars 2018 le vote des travaux d'extension de la médiathèque Jacques Prévert- votés à l'unanimité - et indiqué être favorable à l'ouverture du dimanche de cet équipement.

Rares sont les bibliothécaires qui remettent en cause la nécessité d'ouvrir plus souvent leur établissement pour répondre à l'emploi du temps des usagers. Le problème reste celui des moyens. C’est  une attente et un besoin pour les usagers, particulièrement dans les grandes villes, et particulièrement dans les quartiers prioritaires. Or avec la baisse des dotations aux collectivités territoriales, il est difficile de compléter les équipes des médiathèques par de nouveaux titulaires (d'ailleurs, le nombre de places aux concours de bibliothécaires est toujours en baisse) et  les ouvertures supplémentaires impliquent donc une complète réorganisation.

Or à Colombes, en l'absence de débat public sur ces questions - ni en conseil municipal, ni avec les habitants- un certain nombre de questions se posent correspondant à une logique de centralité de Prévert et de disparité des heures d’ouvertures au public entre les 3 médiathèques.

premier point: les amplitudes horaires:

, la médiathèque Jacques Prévert (1700m²) est ouverte 25h30 par semaine au public ; celle des Fossés-Jean (1000m² à l’ouverture du pole culturel et associatif) a la même amplitude horaire  de 25h30 d'ouverture hebdomadaire au public ; quant à la médiathèque de la Marine  (1100m²), elle n’est ouverte  que 17h par semaine au public . Pour mémoire, l’amplitude moyenne d’ouverture à Paris est de 35 h, mais de 41h pour celles qui ouvrent déjà le dimanche (mais hélas avec l’emploi important de vacataires)

On ne comprendrait pas que toute ouverture dominicale ou nocturne ne soit pas précédée par une harmonisation des horaires d’ouverture, Si l’on s’en tient au cap par Françoise Nyssen, une progression de 20% ne permettrait même pas à la médiathèque de la Marine, d’égaler les amplitudes actuelles deux autres médiathèques, et encore moins si celles-ci devaient être ouvertes plus largement au public.

Deuxième point: la centralisation des fonds:

 La médiathèque Jacques Prévert détient historiquement une grande variété des fonds, notamment musicaux et multimédia.  La municipalité privilégie donc, en plus de la superficie plus importante,  l’ouverture de celle-ci le dimanche et privilégie de la sorte la fréquentation de la médiathèque Jacques Prévert sans proposer qui que ce soit pour une meilleure mutualisation des fonds entre les 3 médiathèques.

troisième point: la démocratisation de l'accès à la culture pour tous

Or l’accès à des équipements publics de proximité est un véritable enjeu pour lutter contre la fracture sociale. L’ouverture du dimanche des médiathèques au Petit-Colombes et aux Fossés-Jean mérite d’être posée pour des publics défavorisés, mais aussi pour les habitants des nouveaux programmes immobiliers qui seraient ainsi encouragés dans l’ancrage au quartier et dans le lien social. De plus toutes les enquêtes en France montrent que le public du dimanche n’est pas le même qu’en semaine et est plus familial, Ce nouveau type de fréquentation est un atout en terme d'éducation populaire.

D’autres questions doivent interpeller les habitants et les élus : la médiathèque devrait dépasser sa seule vocation culturelle pour embrasser aussi une vocation sociale, urbaine et éducative. Pour y parvenir, on doit inventer un autre modèle. assorti d’un élargissement des horaires d’ouverture, par exemple le matin pour permettre aux personnes en situation d’isolement, les retraités, de venir lire le journal, voire de les aménager en lieux de vie complémentaires de nos CSC, ou de les articuler avec eux.

Aujourd’hui, une extension significative des horaires d’ouverture ne signifierait pas seulement un service public accru. Elle rendrait possible la transformation de nos médiathèques en véritables foyers d’un champ culturel réinventé.
 

Ouvrir le débat:

Les écologistes pensent qu'il faut avancer sur la question de l'ouverture du dimanche avec circonspection, et procéder sous forme d'expérimentation dans les deux ou trois ans à venir:

- vérifier les impacts en terme d'emploi et de qualité du travail pour les agents communaux, et concerter ce point avec les organisations syndicales et les agents des médiathèques;

- privilégier le volontariat des équipes des médiathèques.

- prévoir que les heures du dimanches seront des heures supplémentaires rémunérées en conséquence

- bien sûr, comme le préconise le rapport Orsenna, il faut continuer dans la voie de la rationalisation des tâches répétitives pour dégager du temps pour les agents des médiathèques. Et si l'on souhaite faire appel à des vacataires, faire un sorte de professionnaliser des vacataires déjà en poste qui pourraient de la sorte compléter leurs revenus et diminuer leur précarité.

- l'ouverture du dimanche pour le seul centre-ville ajoute de la discrimination culturelle à de la discrimination sociale et urbaine. Il semblerait qu'on estime en haut lieu qu'il est plus facile de venir des quartiers périphériques vers le centre-ville que d'ouvrir les trois équipements. Est-ce un argument raisonnable?

- en outre cette ouverture dominicale pour le seul centre-ville soulève des questions écologiques: on vient par quel moyen de transport en centre-ville le dimanche?

- la question du cout d'ouverture simultané des trois médiathèques serait une des raisons de ce choix. C'est une question qu'il faut regarder le plus sérieusement du monde. Mais, si l’on considère que les médiathèques peuvent devenir un lieu charnière entre l’éducation et la culture - en intervenant partout, dans tous les domaines d’expression et tout au long de la vie - il conviendra surtout de mettre en œuvre de multiples partenariats et d’opérer des transferts significatifs de moyens (humains, techniques ou financiers permettant de maitriser le budget communal) dans les priorités éducatives pour consolider le réseau des médiathèques. C’est à cette condition que l’on pourra juger de l’efficacité et du courage des politiques publiques de la municipalité. On peut aussi imaginer une ouverture tournante entre les trois médiathèques afin de faciliter leur utilisation dominicale et/ou en soirée de façon à concilier équité en gestion de personnel et avantages pour tous les habitants de Colombes.

- enfin, lorsqu’on évoque le réseau des médiathèques, on ne peut que s'interroger sur l'absence d'une amorce de réflexion à l'échelle intercommunale de la boucle nord.  

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