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3 janvier 2018 3 03 /01 /janvier /2018 17:04

En Iran, où le Nouvel An de l'année 2018 aura lieu le 21 mars, on n'est pas synchronisé avec l'Occident. On manifeste comme un jour ordinaire en Europe. La liberté n'attendra pas. Source : https://www.ncr-iran.org/fr/

Remettre les compteurs à zéro. Repartir du bon pied. Toujours remettre le monde sur le travail. Tel est l’horizon des Occidentaux qui tentent d’imposer, en vain, aux autres cultures du monde leur Nouvel An du 1er-Janvier.

Car les Chinois, les Indiens, les Musulmans et bien d’autres, tiennent à leur calendrier et se fichent du nôtre, en faisant mine de se plier à ces dates communes que l’Occident a réussi à imposer à la fin du XIXe siècle. S’il faut bien un temps mondial pour l’aviation, les bourses des valeurs et le business, s’il faut un accord pour que les agendas de la jet set politique, diplomatique et commerciale concordent un tant soit peu, s’il faut bien célébrer quelques événements « mondiaux » comme la fin des guerres, la mort d’un empereur, la distribution des prix Nobel, tout cela fait-il un temps « mondialisé » ? Pas sûr. A Marrakech et Mascate, à Bombay et Jakarta, ce lundi 1er janvier était un jour très ordinaire dans les rues. A Tokyo, on faisait la queue devant les temples dans la nuit du 31 décembre et toute la journée du 1er janvier. Mais les Japonais célèbrent moins le temps qu’ils ne prennent une pause accordée pour ce grand week-end familial : les gares sont bondées et les restaurants pris d’assaut dans un pays qui ne pratique pas facilement les grands congés.

 

Au Japon, la parade du renard qui rassemble des festivaliers portant des masques de renard désignant également Kitsune, un personnage du folklore japonais. Une fête loin du feu d’artifice de minuit en Occident.

Dans leur fabuleux Dictionnaire critique de la mythologie (1), J.-L. Le Quellec et B. Sergent expliquent que la mesure du temps est longtemps fondée sur des mythes astronomiques nés des constellations, les groupes d’étoiles étant nommés pour des raisons calendaires agricoles ou matrimoniaux. Les deux grands luminaires, le Soleil et la Lune, marquent le temps différemment jusque dans les calendriers juif, musulman et orthodoxe, mais aussi chez les Amérindiens, les Papous de Nouvelle-Guinée. Dans la Polynésie, le Nouvel An donne lieu à des rites annuels de fertilité et se relie au thème du retour des morts et d’un dieu de l’abondance. Le capitaine Cook identifié par les Hawaïens au dieu Lono paie de sa vie le fait d’arriver au mauvais moment, selon l’anthropologue Marshall Sahlins.

Dans le même ouvrage, l’article « Nombres et mythes » compte pas moins de vingt-cinq pages sur le sens des nombres que les humains utilisent dans notre lecture des faits jusqu’au fétichisme dénoncé par de nombreux auteurs. En prenant le nombre « 1 » qui signifie l’unité de l’Univers, de l’Homme, qui est à la base du monothéisme, on apprend qu’il existe une vraie mythologie arithmétique en Afrique du « 1 » du dieu suprême, car à l’origine du monde. Mais point de Nouvel An… Qui osera encore parler de mondialisation quand il s’agit de l’heureux échec d’une occidentalisation qu’on a crue inéluctable et invincible ?

(1) Dirigé par Jean-Loïc Le Quellec et Bernard Sergent, CNRS-Editions, 2017, 1 554 p

Libération, Gilles Fumey  le 3 janvier 2018

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